La " vraie " histoire de la Fontaine PACCARD

Interview de Georges BASSIEU, ancien Maire,

au sujet de l'histoire de la fontaine de la place du village.

Massignieu de Rives – 15 novembre 2016

« Dans toutes les cours des habitations il y avait des puits, et les gens tiraient l'eau avec une chaîne. Parfois la chaîne chassait et il fallait aller rechercher le seau au fond avec des crochets.

Donc le Maire de l'époque, Monsieur PACCARD, a réfléchi, a recherché où l'on pouvait trouver de l'eau pour alimenter le village, simplement le village. En se promenant, il avait trouvé deux sources sur la colline de PARVES. Deux sources qui n'étaient pas très loin l'une de l'autre.

Il n'y avait pas assez d'eau sur une seule source, donc il a capté la première source pour la ramener sur la deuxième, comme ça cela faisait plus d'eau. En dessous il a fait un bassin pour capter l'eau des deux sources. Et après il a fallu amener l'eau jusqu'au village. Entre Massignieu et Sillins. Aujourd'hui il y a beaucoup de bois et ça ne se voit pratiquement plus. Le bassin existe toujours, et c'est d'ailleurs moi qui suis allé le boucher pour qu'il n'y ait plus d'eau qui descende pour inonder le village.

Une fois que l'eau a été captée, des gens du village ont fait les travaux, à la pelle et à la pioche, pas avec un tractopelle comme maintenant, pour emmener l'eau dans le village, vers l'église, dans une grande citerne. C'est moi qui l'ai fait démolir. Cette grande citerne récupérait l'eau des deux sources. Maintenant, à la place de cette grande citerne, il y a des sanitaires, vers la porte du cimetière.

Après, il a fallu créer la fontaine, celle que vous voyez aujourd'hui. Seulement, sur la place, ce n'était pas comme c'est aujourd'hui ! La place n'existait pas. Il y avait la cure, là où habitait le curé, et devant il y avait le jardin du curé qui venait jusqu'au bord de la route. Il y avait aussi le chemin qui venait de la route actuelle qui s'appelle la route du Chatenay. Le Maire, Monsieur PACCARD a acheté du terrain derrière la cure (au nord) pour faire un échange avec le terrain au sud, où il y avait le jardin du curé, pour pouvoir créer la place. Mais les curés avaient un puits dans ce jardin, pour leurs besoins personnels. L'échange a eu lieu, la fontaine a été construite, et un robinet a été installé, plus haut, dans le jardin des curés, pour qu'ils puissent avoir de l'eau, en remplacement de leur puits.

La fontaine a été inaugurée en 1893. D'ailleurs c'est marqué sur le fronton de la fontaine. C'est un don, puisque Monsieur PACCARD, pour faire tout ce que je viens de vous expliquer, il a payé de sa poche, avec son argent. A l'époque c'était des francs-or. Çà lui a coûté 5000 francs-or ( soit une estimation de 20 000 €) . A l'exception du raccordement de la citerne à la fontaine, qui a été payé par la commune. Monsieur PACCARD a été élu en 1882, la fontaine a été inaugurée en 1893. Les travaux ont duré trois ans. C'était pas facile à cette époque. Sauf l'échange, parce que les curés étaient bien conscients du problème, parce qu'il n'y avait point d'eau au village, et à ce moment là, les gens étaient très soucieux d'avoir de l'eau, parce qu'ils avaient surtout peur des incendies. Comme il n'y avait pas d'eau, si il y avait le feu, les maisons brûlaient. D'ailleurs, en 1870, le quartier du haut, au mois d’août, toutes les maisons ont brûlé... parce qu'un monsieur a fait brûler de la paille vers chez lui, et le vent soufflait, et à cette époque les toits étaient tous couverts en chaume (c'est du roseau).

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Monsieur PACCARD a été élu en 1882 jusqu'à 1899, il n'a pas fini son troisième mandat, parce qu'il est mort. La fontaine a été raccordée à la fontaine, et l'eau coulait tout le temps, parce que les sources coulaient. D'un côté de la fontaine, il y a 2 robinets : il y en a un où l'on tire de l'eau manuellement, et à côté il y a un deuxième tube qui servait pour ce qu'on appelait le trop-plein.

Quand la citerne était pleine, elle ne débordait pas, mais elle coulait dans le trop-plein. Enfin, elle coulait dans le bac, là où il y a des fleurs maintenant. Mais à l'époque il n'y avait pas de fleurs, et tous les animaux comme les bœufs, les vaches, les chevaux venait boire au bac. Et l'eau du trop plein allait soit dans les prés, derrière la cure, soit elle était captée , ça se voit toujours sur la droite de la fontaine, il y a un tuyau avec une grille, enfin c'est peut-être bouché maintenant... L'eau était captée, et était emmenée sur la route de Rives, vers chez moi, et ils ont créé un lavoir, à 150 mètres de la place. L'écoulement de l'eau du bac, plutôt que de la jeter dans les prés, et qu'elle servait à rien, elle allait dans ce lavoir, et ce lavoir servait aussi aux animaux pour boire, et aux femmes pour laver leur linge...

Tout ça a en partie disparu quand on a mis l'eau courante dans les maisons. L'eau courante, est arrivée devant chez moi quand je suis parti en Algérie. C'était donc en 1959. Le premier qui a eu l'idée de mettre l'eau (courante) c'était dans les années 1951, 1952, c'est le Maire de Nattages, Monsieur MARET, et la commune de Nattages ne pouvait pas le faire toute seule. Donc il est venu voir le Maire de Massignieu et ils ont décidé, avec ces deux communes de « mettre l'eau ». Ils ont invité après la commune de Parves. Ces trois communes se sont mises en syndicat pour l'installation de l'eau courante. Un puits a été creusé dans la plaine, après il a fallu créer un station de pompage. Et après on a fait une station de traitement de l'eau, parce qu'on a découvert du fer dans l'eau, qui lui donnait une couleur rouge. L'eau était traitée à la chaux, pour l'envoyer chez les gens, pour qu'elle soit propre et potable.

C'est comme ça qu'on a eu l'eau, et qu'après beaucoup de gens sont venus construire à Massignieu, à Parves et à Nattages, parce qu'il y avait de l'eau. Et puis, quand il y a eu des travaux sur le Rhône par la Compagnie Nationale du Rhône (CNR), quand ils ont créé le canal, là où il y a le lac maintenant, pour faire une usine électrique à Bregnier Cordon. Il a fallu barrer le vieux Rhône (Rhône naturel) pour envoyer l'eau dans le canal. Le lac, ils ne l'ont pas creusé parce qu'avant c'était un marécage. Mais comme ils ont pris de l'eau dans le vieux Rhône pour alimenter le canal, et comme la station de pompage était dans la plaine, le niveau de la nappe phréatique qui alimentait le captage de l'eau a baissé de 3 mètres. Il n' y avait donc plus assez d'eau pour alimenter notre syndicat. La CNR était responsable de la baisse du niveau de la nappe phréatique dans le puits. Elle en a été consciente, et elle a recherché de l'eau à un endroit où il y en avait beaucoup. Ce qui fait que l'eau potable actuelle vient de CRESSIN ROCHEFORT. A l'époque ils ont fait des essais, ils ont pompé pendant 3 jours avec des grosses pompes, jamais le niveau (de la nappe phréatique) a bougé, et depuis l'eau vient de CRESSIN ROCHEFORT et on alimente le syndicat avec ça. Et la première station qui avait été construite ne sert plus à rien. Elle a été abandonnée et maintenant ce sont des agriculteurs qui s'en servent pour eux.

C'est à peu près à la même époque de la création de la fontaine, que dans les autres hameaux, ont été créés les lavoirs. Le Maire, Monsieur PACCARD, a fait capter les sources, à SILLINS, à ECRIVIEUX, à CHARBONNOT (mais il n'existe plus), aux MURES pour créer des lavoirs. Et c'est aussi à cette époque là que votre école a été construite.

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L'école a été inaugurée en 1892. Avant il n'y avait rien ici. Mais ils ont mis 10 ans pour la faire, parce qu'il y a eu beaucoup de problèmes. Quand ils ont fait les terrassements pour l'école, ils ont eu des gros problèmes d'eau. La Mairie faisait partie du même bâtiment. C'était la pièce où il y a aujourd'hui la bibliothèque. Et une partie de la classe c'était le bureau du Maire. Mais c'est moi qui l'ai créé, parce qu'avant le Maire n'avait pas de bureau.

A l'époque c'était un pré ici, qui appartenait à un ancien Maire (vers 1872 – 1873) TISSOT. Il a d'ailleurs un monument à l'entrée du cimetière. C'était un bienfaiteur de la commune. Il a donné du terrain pour créer l'école. A l’époque les filles allaient à l'école chez les sœurs (des religieuses) dans le bâtiment où habite Monsieur Montagnini aujourd'hui, au bout de la rue, au bout du village. Et les garçons allaient à l'école là où habite Monsieur Alonso. En bas, il y avait une partie où c'était la Mairie, et à côté c'était l'école des garçons.

Vers 1883, on a décidé de faire une école, parce qu'il y avait tout un contexte : la séparation de l'église avec l'Etat. Il a été décidé de faire une école laïque mais ils ont mis très longtemps à la faire, parce que ça a duré 10 ans. L'architecte qu'ils avaient pris ; à l'époque on ne l'appelait pas architecte, c'était un agent – voyer, il était de Belley, seulement il avait une sœur qui était religieuse, donc il n'était pas du côté ( = favorable ) de la laïcité. Alors il a fait traîné les choses, en plus il y avait des problèmes d'eau. Ils n'arrivaient pas à évacuer l'eau pour que le bâtiment soit au sec car il n'y avait pas les procédés qu'il y a aujourd'hui. A force de faire traîner les choses, un jour le Maire en a eu assez, il a renvoyé l'agent - voyer et il est allé chercher un autre à Lyon. Celui-ci a fait avancer les choses et à fait construire l'école, comme elle est aujourd'hui. Et après c'est devenu une école mixte avec la séparation de l'église et l'état. Elle a été inaugurée en 1892. …/... »

…/... « J'ai la mémoire qui commence à flancher !  »

NB : Dates et renseignements vérifiables.

Enregistrement retranscrit par T. VINCENT